Ligue des Champions: Le programme du mercredi 28 Mars 2012

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Un commentaire sur “Ligue des Champions: Le programme du mercredi 28 Mars 2012

  1. lE Nouvelliste:

    De coups d’État en coups d’étaux, la Constitution de 1987 survit

    Haïti: 25 ans plus tard, la Constitution de 1987 poursuit son petit bonhomme de chemin. Un sentier agité, sanglant, peu productif, mais, que voulez-vous? Dans un pays aussi montagneux que le nôtre, où, après chaque morne, il y a un infranchissable précipice, la vie n’est pas une longue marche tranquille.

    Tout commence par le dernier acte constitutionnel de Jean-Claude Duvalier. Le président à vie, en application de la Constitution de 1983 amendée, le 7 février 1986, quelques heures avant de partir pour l’exil, désigne son successeur: le Conseil national de gouvernement (CNG).

    Pour éviter toute équivoque, la presse, qui reprend du gallon, affuble le CNG d’un P. Au train de son sigle, le wagon P du provisoire impose que ce gouvernement n’est pas la continuité de celui qui s’en est allé, ni son successeur constitutionnel. Le général Henry Namphy, dans les premières heures du CNG, dissout toutes les institutions et la Constitution des Duvalier. Acte en est pris, et cela impose d’aller dans de nouvelles directions.

    A l’époque, les opposants politiques reviennent au pays par grappes et réclament l’adoption d’une nouvelle Charte. Les temps s’y prêtent. Le changement est dans l’air. Droits humains, liberté de la parole, abolition de la torture, élections libres et démocratie sont chantés à toutes les manifestations.

    Makout pa ladan n!

    Le processus prendra une année et un mois avant que le 29 mars la Constitution dite de 1987 ne soit adoptée après un référendum dont le moteur principal fut le fameux article 291: Makout pa ladan n.

    La principale faiblesse de la Charte naît avec elle. Pour l’écrire, pas de vrais idéologues, pas d’idées directrices, pas de forces économiques ou sociales en concurrence pour y insérer un projet. Beaucoup de bonne volonté. Des bribes de ceci, un peu de cela. Un mélange hétéroclite d’intérêts et d’envies façonnent un texte lourd qui va dans les détails.

    Pour l’adopter, le pays prend le pari de construire l’avenir, avec pour seul ciment sa haine du passé, son envie de changement. Ce n’est pas la première fois que nous nous y essayons. Pas la dernière fois que cela patine et bégaie. L’héritage commun est si pesant que chacun fait de son mieux pour croire que le neuf peut se juxtaposer au vieux, permettre de tisser une étoffe solide et chatoyante.

    L’espérance, cette tisane bonne pour tous les maux, est servie à grandes louches. Faute de mieux. Pour éviter le pire. Même les duvaliéristes, dans les dernières années du règne du fils, cherchaient un nouveau fil conducteur. C’est dire !

    La Constitution de 1987 se revèle très vite pesante. La continuité assassine l’avenir au quotidien; prend forme un mariage boiteux: celui de la carpe et du lapin. Pourtant, pas moyen de faire autrement. Dans les environs, en 1987, il n’y avait ni assez de carpes ni assez de lapins pour faire la fête en paire parfaite. Les Duvaliéristes encore au pouvoir, l’armée aidant, et les opposants revenus de partout, mais pas toujours démocrates, se satisfont de la Constitution imposée par un embryon de la société civile. Aucun des deux ne vit heureux une telle union.

    En 1987, nous n’étions pas assez démocrates, n’avions plus envie d’être macoutes. Il fallait un nouveau contrat social; un assemblage convenu, à défaut d’un ménage heureux.

    Chacun y mit du sien, y alla au prix de quelques renoncements, embrassa de nouvelles convictions. Depuis le 29 mars 1987, on vote, on jure, on parjure, on écarte des articles, on retranche, on corrige, et on meurt au nom de la Constitution.

    Violée et remise en selle à chaque fois

    Cela commença par le serment rigolard, lunettes noires, mine d’enterrement du haut état-major des Forces Armées d’Haïti un jour en plein midi à l’académie militaire. Tout un symbole. Les gradés jurent de respecter la Constitution au cours d’une cérémonie spéciale tenue dans l’antre de l’armée. Il est dit que ce jour-là, les officiers, la main sur le coeur, avaient les gros orteils pointés vers le centre de la terre à s’en dessemeler les bottes pour conjuguer un engagement librement consenti; mais trop lourd à respecter. Dans les faits, l’armée commença par ne pas vouloir d’un Conseil électoral provisoire indépendant, puis permit que les premières élections de 1987 soient noyées dans le sang le 29 novembre 1987.

    Les deuxièmes élections furent une parodie, en janvier 1988.
    La percée louverturienne du plus historien de nos politiciens va dans le même sens. La Constitution est une baïonnette de papier qui prend la forme du fourreau qui le contient, croyait le premier président mal élu de la République sous l’égide de la Constitution de 1987, confiant que celui assis sur le fauteuil bourré du palais national a droit de décider de faire le bien même si pour lui tout commence mal.
    Le président Lesly F. Manigat déchanta très vite quand, à son tour, il voulut jouer avec des prérogatives que la Constitution accordait à l’armée. Les maladresses dans des transferts de l’état-major des FADH et des intérêts lésés s’additionnèrent pour accoucher du premier coup d’Etat de la Constitution de 1987. Une brèche s’ouvrit.

    Rapidement, les militaires se mirent à vouloir précipiter le changement. Namphy II ne vécut que quelques jours. Les « petits soldats » du colonel-général Prosper Avril, après le massacre de St- Jean Bosco, changèrent la garde. Avril lui-même, quand il voulut trop en faire avec la Constitution -amputée de certains articles, tout en gardant les institutions- se fit avoir par la dynamique engendrée par la Constitution elle-même et la pugnacité des forces politiques qui n’ont jamais abandonné le terrain depuis 1986.

    Après une édition particulièrement réussie du carnaval en 1990, les premiers bons jours gras depuis 1985, le général dut céder sa place à la première femme juge à la Cour de cassation de la République. Ertha Pascal Trouillot fit son devoir du mieux qu’elle le put. Après les déconvenues des expériences passées, elle ouvrit la porte à la venue de la première grosse mission d’observation de nos élections. La porte est devenue une avenue. Et depuis, les Haïtiens ont de moins en moins de pouvoirs et de responsabilités à chaque fois qu’il y a des élections. Ce n’est pas tant la faute à la première fois ni aux observateurs, le tort nous revient. La Constitution a mis en place une grosse et chère machine. De plus, chaque électeur veut que son vote compte. On l’oublie trop souvent. Cet acquis et cette attente engendrés par la Constitution de 1987 ont mis fin à bien des ambitions, mis en échec de nombreux stratèges en 25 ans !

    Enfin des élections libres

    Cela dit, enfin, en 1990, les premières-premières élections eurent lieu. Jean Bertrand Aristide les remporta. Et, d’un coup, les faiblesses de la Constitution en termes de projet de société éclatèrent au grand jour. Comment gouverner avec l’appui populaire et un projet qui ne prend pas en compte les forces en présence? Chaque force en présence. Tout se termina dans un bain de sang. Un long massacre de trois ans. La Constitution, increvable zombie, resta en vigueur. Certains jurèrent qu’à l’impossible ils n’étaient pas tenus, d’autres inventèrent un intenable possible. Echec collectif. Mais ce fut encore au nom de la Constitution que le retour constitutionnel fut orchestré après des batailles homériques. Continuer >

    Les militaires, leurs alliés et tacticiens, trop pressés de faire chou et rave, oublièrent de mettre au rancard cet encombrant carcan. Ils se firent avoir par une baïonnette de papier: la sublime Constitution de 1987.

    Le retour d’Aristide et les leçons durement apprises dans les deux camps nous permirent de vivre d’octobre 1994 à février 2004 sans trop de soubresauts, mais avec des variantes innommables de l’application de l’esprit et de la lettre de la Constitution de 1987. Chacun tortura le texte pour en faire comme bon lui semble jusqu’au jour où, en panne de projet, Jean Bertrand Aristide finit encore dans un avion pour l’exil. Pas mieux lotis, ses farouches adversaires ne récoltèrent que des miettes de leur rêve de pouvoir. La Constitution de 1987 leur imposa encore un juge et un Premier ministre qu’ils n’avaient pas choisis et une transition de deux ans.

    Edentés, ratatinés, rabougris, rachitiques, sans chevalier pour la défendre, les restes de la Constitution de 1987 s’imposèrent comme seul texte majeur pour guider la transition. Comme si l’histoire repasse les plats, c’est un vieux président qui revint au pouvoir en 2006 après des manifestations de rues pour l’imposer après un vote sous haute surveillance où des intérêts divergents croisèrent le fer. Le peuple dans une piscine, les amis d’Haïti en maîtres nageurs, les mêmes mauvais perdants en spectateurs, René Préval prêta serment et se mit en tête de modifier cette Constitution, source de tous les tourments, disait-il.

    Que voulait dire l’homme de Marmelade en rendant publics ses états d’âme en octobre 2007 sur le texte légal source de son pouvoir ? Personne ne le sait. Au final, quatre ans plus tard, à la dernière séance de la dernière législature de son mandat, il réussit à faire adopter par l’Assemblée nationale des amendements à la Constitution de 1987. Tout se passa dans une certaine confusion et avec beaucoup de précipitations. Il n’y eut pas ce vent d’espoir qu’on aurait dû attendre d’un aussi grand changement. Le coup de Préval est marquant, d’autant qu’Aristide, les deux Chambres acquises à sa cause, avait échoué à faire modifier la Constitution au cours de son deuxième mandat.

    Un amendement compliqué

    Mais le Préval qui fait voter le texte amendé n’est plus le Préval qui avait la baraka. L’affaire s’enlise dans une succession d’accusations de faux en écriture publique. La version publiée dans le journal officiel est dénoncée par des élus. Après vérification et contre-vérification, l’évidence des tripatouillages est flagrante. Une belle tentative se termine en vaudeville. La Constitution de 1987, quelle que soit la décision de Michel Martelly, le président actuel, ne peut être amendée que par césarienne. Nombreux sont ceux qui dénoncent une indécence, une boucherie, une entorse indigne d’un avenir meilleur.

    La vraie faiblesse du projet d’amendement Préval-Martelly- l’un l’a provoquée, l’autre décidera de son sort- vient du fait que tout s’est fait sans âme, sans projet, sans élan, sans passion, sur un coup de tête, plus que sur un besoin urgent, pressant, de faire mieux. La population indifférente à tout le charivari autour de la question a bien raison de ne pas s’en prendre la tête : qu’est-ce que cela changera de garder ou de changer la Constitution de 1987 ? Rien.

    Jeudi 29 mars, il était frappant de constater où nous en sommes 25 ans après. Les Forces Armées d’Haïti qui ont permis la naissance de cette Constitution n’existent plus et le mouvement des petits anciens-futurs soldats qui se débattent pour se faire entendre est gros d’explication de nos lacunes. Pas de projet, pas d’idées, pas d’idéologues pour une si belle et si profonde problématique. L’armée, l’idée que nous nous en faisons, est livrée à elle-même.
    Le Premier ministre, le poste-phare créé par la Constitution de 1987 pour mettre fin à la faim de pouvoir absolu de nos présidents, est toujours en porte-à-faux avec la pratique. Nous avons un Premier ministre sortant fatigué de se faire humilier et un Premiers ministres désigné fatigué de ne pas être en poste. Aucun de la grosse quinzaine de Premier ministre que nous avons épuisés depuis 1987 n’a eu de fin heureuse ni de mandat facile. Quand ce n’est pas le président qui lui en veut, c’est l’actualité qui le mine. Il est comptable des échecs et des ratés, aucune réalisation ne restera attachée à son nom, à son passage. Le président de la République, pour le meilleur et pour le pire, est le chef. Le Premier ministre, un ministre avec un peu ou pas de pouvoir.
    Le Conseil électoral, garant des élections et du mandat des élus, pierre angulaire de tout le système de représentation, est dans les limbes. Il n’y a pas en place de Conseil électoral ni provisoire, ni définitif. Il n’y a pas de débats ou d’actions en cours pour nous doter de cet organe indispensable. Aucun Conseil électoral n’a laissé d’assez bons souvenirs pour se voir, tel quel, reconduit. Pire, l’office d’identification nationale chargé de doter chaque Haïtien d’un document l’habilitant à prendre part à la vie politique n’existe que sporadiquement à la capitale. Pas du tout sur la majorité du territoire. Comme un pied de nez à notre envie d’avoir un Etat, les parlementaires doutent de la nationalité et de l’identité du président de la République en poste. La société haïtienne doute de la nationalité et de l’identité légale de nombreux parlementaires.

    Panne de projet

    Dans les dossiers plus simples mais fondamentaux, comme l’université ou la langue créole, nous sommes incapables, 25 ans plus tard, d’avancer en bon ordre. La langue qui nous fait vibrer n’est toujours pas fixée. L’Académie de la langue créole prévue par la Constitution n’existe pas. Nous sommes inaptes à donner un corps sain et vigoureux à l’enseignement supérieur. La pensée est indigente; laa formation des professeurs, à tous les niveaux, est défaillante. L’éducation, vrai tonneau des Danaïdes (trou rond sans fond), avale les milliards sans promettre de résultats.

    Nous ne savons pas comment intégrer la diaspora ni ne savons ce que nous devons faire de nos enfants, de plus en plus porteurs de passeports étrangers. Les recettes ne suivent pas la course des dépenses, et notre budget dépend de l’aumône internationale. Si cela n’excuse pas l’inexistence de bon nombre d’institutions prévues par la Constitution, le handicap est patent.
    En conclusion, la Constitution de 1987 n’est pas la meilleure au monde. Elle a les défauts de ses ambitions, les faiblesses de ses limitations. Son projet de société n’a pas assez d’appuis, mais elle demeure la seule béquille pour nous mener à bon port. Elle a tenu le coup en dépit des assauts et des coups d’étaux. Elle a fait le lit des coups d’Etat et permis à des pouvoirs démocratiques de prendre place et aux démocrates de se défendre des appétits des fossoyeurs de liberté. Elle n’est pas immuable, la Constitution de 1987. On peut la changer, la modifier, la mettre en veilleuse, la dénoncer, l’abandonner. Quelle que soit l’option choisie, que cela soit pour le meilleur et pas pour le pire!

    Les serments en plein midi de la respecter n’éblouissent que ceux qui regardent le soleil en face. Les serments dans le noir ne doivent pas laisser croire que toute la population n’a pas entendu les engagements pris envers cette dame sans défense, vulnérable, fragile, difforme, à laquelle nous tenons tant. Malgré tout.

    Frantz Duval

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